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Les investissements ESG

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« Le plus dur c’est l’atterrissage »

Film « La Haine »

Après la Virginie du Sud, l’Utah et le Texas, le Gouverneur du Kentucky vient d’interdire aux fonds de pensions publics d’investir dans les fonds « ESG ». L’argument principal des détracteurs de l’ESG, argument qui d’ailleurs peut être entendu, est qu’un gérant n’a pas la compétence pour mesurer les critères extra-financiers et qu’il a déjà bien assez à faire pour générer de la performance. Ces fonds de pensions sont là pour préparer la retraite des souscripteurs et donc leur seul objectif doit être la recherche de performance.

On peut comprendre ce raisonnement quand on sait que l’hégémonie de l’économie américaine s’est construite depuis plus d’un siècle sur les hydrocarbures et que des états producteurs de pétrole voient d’un mauvais œil la raréfaction des financements du secteur qui les fait vivre.

Ce mouvement prend une telle l’ampleur qu’aux US, Larry Fink premier apôtre de l’ESG et patron de Blackrock, le plus grand gérant par la taille des actifs, doit maintenant revoir son discours pour ne pas perdre ses clients.

L’Europe, principale locomotive en matière d’ESG, n’est pas encore atteinte par ce mouvement même si on commence à voir des secteurs se rebeller contre des mesures difficiles à appliquer comme la fin des moteurs à essence tant les infrastructures de transition sont absentes. L’Allemagne n’a pas hésité à rouvrir des centrales à charbon pour passer l’hiver alors que d’ici 2030 toute exploitation du charbon devrait avoir disparu.

Pourtant, taper dans le portefeuille des sociétés est un moyen efficace de les forcer à s’adapter. Mais d’après les scientifiques du GIEC, le compte n’y est pas, loin s’en faut. La décarbonation des entreprises est en retard. Les indices de températures de MSCI le montrent aussi : aucun des objectifs de réduction des émissions et donc de hausse des températures ne pourront être tenus avec la trajectoire actuelle. Moins de 10% des fonds gérés dans le monde sont alignés sur les 2% de hausse de la COP21. Toutes les entreprises sont bien conscientes de la nécessité de se transformer mais toutes espèrent être la dernière à devoir s’y mettre (le « toi d’abord »).

C’est aussi pour éviter le « greenwashing » que les entreprises sont dans l’obligation depuis 2023 de publier avec leurs résultats une liste importante d’indicateurs permettant de mesurer leur stratégie ESG. Difficile de se cacher maintenant. On peut donc s’attendre au retour en force des lobbies pour lutter contre des mesures qui menacent leur activité.

Finalement, je peux rejoindre ces gouverneurs républicains, mais avec une conclusion diamétralement opposée : taper dans le portefeuille ne suffira pas. C’est au politique de prendre les choses en main et d’accompagner la transition avec des choix forts. Le temps presse messieurs-dames, hâtez-vous !

Philippe de Gouville
CEO et co-fondateur d’Ismo