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La hausse des actions peut paraitre énigmatique quand on sait qu’il y a toujours de l’inflation, que les taux montent et que les risques de récession sont bel et bien là. Mais deux forces considérables sont à l’œuvre et provoquent l’afflux quotidien d’ordres d’achats massifs. Or ce sont les ordres qui font les mouvements.

Force 1 : les fonds indexés et la baisse de la volatilité

La volatilité s’effondre (voir plus bas pourquoi). Beaucoup de fonds ou de produits d’investissement utilisent la volatilité pour établir leur niveau d’exposition. Le principe est le suivant : si la volatilité est basse, c’est que les investisseurs sont confiants et que l’environnement est favorable au marché. Les produites ‘vol-target’ sont très répandus et appliquent ce principe : tant que la volatilité est en dessous d’un certain niveau, le produit est en actions, sinon il est en cash. Ces produits ont donc dû automatiquement switcher du cash vers les actions récemment. Les produits ‘risk parity’ ont un mécanisme proche. Plus l’actif est risqué, moins on en met. Mais quand le risque baisse (ie la volatilité) on en met plus. Ces produits, et les algorithmes qui les régissent, assurent donc un flux régulier d’ordres d’achats. Il se trouve que le volume de ces produits a littéralement explosé ces dernières années.

Force 2 : les options daily

Il s’agit d’options (voir ci-dessous) dont l’échéance est le jour même. Si vous pensez que le marché va monter dans la journée, il suffit de trouver un trader qui voudra bien vous vendre une option d’achat. Tout va bien tant que le volume de ces options est raisonnable. Spoiler : il ne l’est plus. Le volume quotidien est considérable. Il représente la moitié du volume total des options traitées chaque jour. On n’est pas loin de la manipulation de marché. Par exemple, si j’achète une option d’achat sur l’eurostoxx 50, le trader va acheter l’eurostoxx 50 pour se ‘couvrir’, ce qui fait monter le marché. Et si l’indice monte encore, il doit à nouveau en acheter. Lorsque la volatilité baisse, les traders d’options deviennent souvent ‘gamma positive’. C’est un truc un peu technique qui fait que les traders doivent vendre quand ça monte et acheter quand ça baisse. Cela fait mécaniquement baisser les fluctuations du marché et donc sa la volatilité.

Indice de volatilité sur le S&P 500 (VIX) et sur le STOXX50E (VSTOXX)

On le voit la force 2 entraine le marché à la hausse à cause de la couverture des options et la baisse de volatilité fait acheter toute baisse de marché et réduit la volatilité. Cette baisse de volatilité alimente alors la force 1 : les 2 forces s’auto alimentent.

Autres forces

Il y a d’autres produits, comme les produits structurés dans lesquels l’utilisateur final vend de la volatilité (pour avoir un coupon bonifié par exemple ou pour financer l’achat de protection). Il y a aussi le programme de rachat d’actions par les entreprises ou le réinvestissement des dividendes en actions qui poussent mécaniquement les actions vers le haut, mais de façon plus cyclique. Enfin les hedge funds spécialisés dans le suivi de tendances, achètent le marché quand il progresse.

Le danger de tout ça ?

C’est le risque de décrochage des valeurs par rapport à leur valeur fondamentale. Le marché finit toujours par se corriger. Le danger c’est que le calme apparent est artificiel. Il est amplifié par les phénomènes que je viens de décrire qui enfoncent la volatilité vers des niveaux historiquement très bas. Plus on tire sur l’élastique, plus retour sera violent et douloureux. Si un évènement venait à provoquer la hausse du risque (et donc de la volatilité), on aura droit au phénomène de la ‘porte de saloon’ : tout le monde voudra sortir du bar alors qu’il est en le feu. La plupart seront brulés.  Les ‘vol-target’ devront vendre leurs actions pour passer en cash, les ‘risk-parity’ baisser leurs expositions. Le volume des options daily baissera, les positions ‘gamma positives’ deviendront ‘gamma négative’ : il faudra vendre dans la baisse, à tout prix. Le marché est un gigantesque oscillateur, on l’espère amorti, un peu comme un tremblement de terre dont on doit subir les répliques.

Comme toujours, les marchés ont surmonté les crises les unes après les autres. Donc pas de panique, d’autant plus que personne ne sait vraiment si le marché est trop cher et jusqu’à quand la hausse peut se poursuivre, n’en déplaise aux dizaines d’analystes qui jouent les oracles sur les chaînes spécialisées chaque jour. Il faut juste être préparé. Cela ne veut pas dire vendre si vous êtes investisseurs à long terme. Le market timing est très difficile. La prochaine crise apportera son lot d’opportunités d’achat sur de meilleurs prix permettant de profiter des caractéristiques long terme des actions. Comme toujours, pour ne céder à la panique, il suffit souvent d’être bien informé pour comprendre ce qui se passe.

Le coin des définitions

VIX, VSTOXX :

Indices de volatilité respectivement sur le S&P500 et le eurostoxx50. Ces indices sont aussi appelés les ‘index de la peur’. Ils reflètent la nervosité des investisseurs. En période de crise ils sont très élevés. Ils redescendent doucement lorsque que le calme revient.

Options :

Il s’agit d’un droit, mais non une obligation, d’acheter (call), ou de vendre (put), un actif à un prix déterminé à l’avance. On peut acheter un call (achat d’un droit d’acheter) ou vendre un call (vendre le droit d’acheter)

Supposons que vous pensiez qu’un actif va monter :

Le profil gain/perte à l’échéance d’un achat option

Achat d’un CALL 30 de prime 3

Achat d’un PUT de prime 3

Philippe de Gouville
CEO et co-fondateur d’Ismo

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